mercredi 21 mars 2018



Couleurs de l'incendie, Pierre Lemaître,
Albin Michel, 2018

Si vous avez comme moi adoré "Au-revoir là-haut", plongez-vous sans plus tarder dans ce nouvel opus, où l'on retrouve Madeleine Péricourt, la fille de Marcel, l'ex-femme du détestable et cynique Henry d'Aulnay-Pradelle, face à un destin retors et compliqué.

Le roman débute par les obsèques du patriarche. La cérémonie en grande pompe se trouve franchement perturbée par une scène inaugurale fort inattendue : le petit Paul Péricourt se jette par la fenêtre et atterrit sur le catafalque de son grand-père. Désormais seule à la barre, Madeleine, tout en veillant sur son fils, tente de reprendre l'empire familial et financier en mains. Mais c'est sans compter sur la crise de 1929 et surtout sur la soif de pouvoir et d'argent de son entourage.

Dans un style toujours aussi percutant et truculent, Lemaître nous brosse le destin de personnages cocasses, d'autant plus attachants, qu'ils sont invariablement en proie à leurs démons intérieurs. On ressent la jubilation de l'écrivain. Son sens de la formule fait mouche, interpelle et aiguillonne sans cesse le lecteur. On rit aux éclats en lisant le portrait au vitriol des deux filles de l'oncle Charles, dont la laideur n'a d'égale que la sottise. Certains passages, sur le petit Paul notamment, font venir les larmes aux yeux. La tonitruante cantatrice Solange Gallinato ponctue le récit de ses télégrammes bourrés de fautes, tout comme l'insatiable nurse Vladi, avec ses répliques polonaises. Le roman est truffé de phrases et d'expressions que l'on pourrait extraire du livre pour en faire autant d'aphorismes plein d'humour et d'ironie sur la vie et sur les hommes.

Dans un rythme cadencé, l'auteur maîtrise parfaitement son récit qui défile, ralentit, rebondit, nous tient en haleine du début jusqu'à la fin. Son écriture, extrêmement visuelle, cinématographique, nous fait voir les scènes avec réalisme et précision, comme si l'on se trouvait là, aux côtés des personnages.
Un nouveau coup de maître ! (Stéphanie, Médiathèque de Thann)

Quelques citations :
Au sujet d'une réunion annuelle des anciens de la Promotion "Gustave Eiffel" de l'Ecole Centrale :
" La conversation suivait un parcours immuable. La politique d'abord, puis l'économie, l'industrie, on terminait toujours par les femmes. Le facteur commun à tous ces sujets était évidemment l'argent. La politique disait s'il serait possible d'en gagner, l'économie combien on pourrait en gagner, l'industrie de quelle manière on pourrait le faire, et les femmes, de quelle façon on pourrait le dépenser. Cette assemblée tenait à la fois du repas d'anciens combattants et du concours de paons, tout le monde venait y faire la roue."

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